Le cimetière de SIDI KEBIR

(Syndicat d'initiative de la région blidéenne)

C'est en amont, également sur les bords de l'oued El Kébir à 3 kilomètres que se trouvent le petit village et le légendaire cimetière de Sidi El Kébir.

Pour y parvenir il faut, en partant de la place d'Armes, remonter la rue Tirman. Après avoir franchi la porte Bab El Rabah, s'engager dans l'avenue des Moulins, ombragée par de hauts platanes, bordée de maisonnettes et de villas.

C'est une promenade très agréable, peu fatigante, au milieu d'un paysage sans cesse renouvelé. Arrivé au bout de l'avenue, on longe de vastes moulins mus soit par l'électricité, soit par la force hydraulique. Le chemin s'infléchit et passe sur un pont moderne construit en 1916 et auquel aboutit une digue de protection construite dans le lit de l'Oued jusqu'au jardin Bizot. Un peu plus loin, sur la droite, de vastes bâtiments s'étagent dans la verdure. Ce sont les moulins Maurice-Henri Ricci. On arrive ensuite au barrage qui dérive les eaux de l'oued en vue de l'arrosage des jardins et des orangeries de Blida.

A quelque cent mètres de là, la promenade devient ravissante. Fromentin l'a décrite dans « Une Année dans le Sahel ». La vue n'a pas changé. « La route s'engage alors dans le ravin entre des pentes fort pittoresques, parmi des rochers tombés de la montagne et roulés par la rivière au moment des grandes eaux. L'oued coule à côté du sentier, tantôt sur un lit de sable et de gravier ressemblant à de l'ardoise en poudre, tantôt à travers de larges blocs que le courant contourne en écumant un peu. La montagne est rocheuse, escarpée et fréquemment creusée par de profonds éboulements. On y voit peu d'arbres, excepté de loin en loin quelques vieux oliviers plantés presque horizontalement dans les talus, qui restent attachés par les racines et dont le branchage échevelé pend sur le chemin. Un peu plus loin, la gorge s'élargit et se découpe en ravins latéraux : la végétation s'épaissit et chaque écartement de la montagne forme alors un entonnoir baigné par le fond et encombré de hauts feuillages... »

Sans s'en apercevoir, on arrive au lieu dit Fontaine Fraîche et au village de Sidi Kébir. C'est là que le lundi de Pâques, suivant la tradition espagnole, on vient faire « la mouna », c'est-à-dire, manger en famille, au murmure de l'eau, un gâteau, parfumé d'anis.

La légende attribuait des vertus miraculeuses aux eaux de cette source abondante et limpide. Elles ont. été captées pour alimenter Blida. On ne les voit plus, mais on les entend dans le château d'eau.

En face de Fontaine Fraîche, à flanc de coteau, voici donc la zaouïa de Sidi Ahmed El Kébir. Tous les habitants du petit village saint sont d'origine maraboutique et descendent directement de l'humain protecteur des maures andalous, fondateur de Blida. Ils vivent des pieuses offrandes que, chaque année, viennent leur apporter en pèlerinage, en ziara solennelle, bigarrée et harmonieuse, à la fête des Bougies, les nombreux croyants de la région. Ce soir-là, la petite place triangulaire à laquelle on accède par une ruelle en pente, tendue «le guirlandes, ornée d'étendards, prend un aspect féerique.

C'est là qu'on vend à l'encan des cierges « qui portent bonheur », et plus d'un Européen se mêle à la foule avec des sentiments qui ne sont pas seulement de la curiosité.

Ce petit village paisible au sol sacré est protégé par le cimetière qui le surplombe. Là repose le vénéré Sidi El Kébir, saint entre les saints aimés de Dieu. Quand il arriva vers l'an 1519 (925 de l'hégire) après avoir visité la Mecque et posé son front sur les dalles de la mosquée de Cordoue, pieux voyageur au manteau douze fois rapiécé qui avait pleuré sur Grenade, toute la gorge était aride, sauvage, solitaire. Mais le saint homme fouilla les ravins, gravit les pentes du Djebel Dakhla qui s'élève chez les Mouzaïa ; par une belle nuit d'étoiles il découvrit le chant d'une source abondante et pria Dieu de la dé­tourner vers le vallon prédestiné.

Fondateur et protecteur de Blida, il vécut retiré dans le village. Il mourut en 1340.

La légende rapporte qu'il fut impossible d'élever sur son tombeau la traditionnelle Koubba blanche que l'on consacre aux saints. A peine était-elle construite que des forces inconnues la faisaient s'écrouler. On interpréta ce prodige comme une volonté posthume du saint qui désirait dormir à l'air libre.

 

Auprès de lui reposent ses deux fils. Les cubes de maçonnerie couronnés de coupoles qui leur servent de tombeau, les autres tombes plus modestes qui hérissent le sol forment sous les oliviers tordus et les caroubiers tourmentés un tableau des plus pittoresques dont l'on emporte un souvenir attachant.